L'obligation de déclaration de soupçons incombant aux avocats dans le cadre de la lutte contre le blanchiment ne porte pas une atteinte disproportionnée au secret professionnel.
C'est ce que vient de juger la Cour européenne des droits de l'homme dans l'affaire Michaud contre France.
Au même titre que les experts comptables et les commissaires aux comptes, les avocats français sont en effet tenus de déclarer leurs soupçons relatifs aux éventuelles activités de blanchiment menées par leurs clients (c. mon. et fin. art. L. 561-15). Dans cette affaire, le requérant, avocat inscrit au Barreau de Paris, considérait que cette obligation, qui résulte de la transposition de directives européennes, entrait en contradiction avec l'article 8 de la Convention qui protège la confidentialité des échanges entre l'avocat et son client.
Pour juger que l'obligation de déclaration de soupçons ne porte pas une atteinte disproportionnée au secret professionnel des avocats, la CEDH rappelle tout d'abord que ceux-ci n'y sont pas astreints lorsqu'ils exercent leur mission de défense des justiciables.
En effet, la déclaration de soupçons par les avocats ne vise concrètement que deux situations, relativement éloignées de leur mission de conseil et consultation juridique, à savoir :
- lorsqu'ils participent au nom et pour le compte de leur client à des transactions financières ou immobilières ou agissent en qualité de fiduciaire ;
- lorsqu'ils assistent leur client dans la préparation ou la réalisation de transactions concernant certaines opérations définies.
De plus, la loi a instauré un filtre protecteur du secret professionnel en prévoyant que les avocats ne communiquent pas directement leurs déclarations à l'administration (Tracfin) mais à leur bâtonnier. De ce fait, la CEDH considère que partager ces informations avec un professionnel soumis aux mêmes règles déontologiques et élu par ses pairs n'altère pas le secret professionnel.