Lorsqu’il quitte le cabinet dans lequel il est associé pour exercer dans un autre cabinet et qu’une partie de sa clientèle le suit, un avocat ne commet pas d’acte de concurrence déloyale dès lors qu’il n’a pas eu recours à des manœuvres frauduleuses.
Comme de nombreux professionnels libéraux, les avocats sont soumis à des règles déontologiques strictes. Ainsi, ils doivent notamment exercer leur fonction avec loyauté vis-à-vis de leurs clients, mais également à l’égard de leurs confrères. Un principe qui leur interdit, par exemple, de recourir à des manœuvres visant à détourner la clientèle d’un cabinet.
Ainsi, dans une affaire portée devant la justice, un avocat avait quitté la société civile professionnelle (SCP) dans laquelle il avait le statut d’associé afin d’exercer dans une société d’exercice libéral. Peu de temps avant son départ, plusieurs clients qu’il représentait au sein de la SCP avaient demandé que leur dossier soit transféré au sein de la société d’exercice libéral. Estimant que l’avocat avait eu un comportement déloyal visant à capter une partie de sa clientèle, la SCP avait alors saisi le bâtonnier de l’ordre des avocats.
Dans un premier temps, le bâtonnier avait accueilli la requête de la SCP et condamné l’avocat à lui verser des dommages et intérêts pour le préjudice subi. Ce dernier avait alors fait appel de cette décision.
La Cour d’appel de Paris et la Cour de cassation lui ont donné raison. En effet, pour les juges, le simple fait, pour l’avocat, d’avoir informé les clients de son départ de la SCP ne constituait pas une incitation à faire transférer leur dossier. Il n’était donc pas établi que l’avocat avait recouru à des manœuvres visant à capter les clients de la SCP. Sachant, en outre, que divers clients avaient précisé avoir eux-mêmes fait le choix de suivre l’avocat en raison des liens de confiance noués avec lui, pour certains depuis de nombreuses années. Enfin, les juges ont retenu que le départ d’une partie de sa clientèle n’avait pas eu d’incidence avérée sur le chiffre d’affaires de la SCP. Et donc que l’avocat n’avait pas commis d’acte de concurrence déloyale.
Cassation civile 1re, 6 juin 2018, n° 17-13101