En cas de doute, vous pouvez, en tant que particulier ou professionnel, interroger l'administration sur l'application d'une règle fiscale à votre situation. Zoom sur cette procédure particulière, plus connue sous le nom de « rescrit fiscal ».
Que pouvez-vous demander ?
La demande de rescrit peut porter, en principe, sur tous les impôts, droits et taxes prévus par le Code général des impôts. Elle peut concerner l'assiette, le taux, la liquidation et les règles de prescription de l'impôt, et viser tous les textes fiscaux (convention internationale, loi, décret ...).
En pratique, vous pouvez, par exemple, demander à l'administration si votre situation vous permet de bénéficier d'un avantage fiscal (réduction, exonération, crédit d'impôt...) ou si, au regard de la nature de votre activité, vous devez être imposé dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux (BIC) ou dans celle des bénéfices non commerciaux (BNC). Vous pouvez aussi interroger l'administration sur la déduction supplémentaire de frais professionnels.
Quel formalisme appliquer ?
La demande de rescrit doit être formulée par écrit et indiquer votre nom (ou la dénomination de votre société) et votre adresse. Et vous devez, bien entendu, être de bonne foi.
La demande doit donc comporter une présentation précise, complète et sincère de votre situation et distinguer, selon les dispositions concernées, les informations nécessaires à l'administration pour apprécier si vous remplissez effectivement ou non les conditions requises par la loi. Vous devez également préciser les dispositions légales que vous souhaitez appliquer.
La demande doit être transmise par lettre recommandée avec avis de réception ou faire l'objet d'un dépôt contre décharge.
Où adresser la demande ?
Votre demande doit être adressée, selon son objet, au service des impôts auprès duquel vous devez souscrire vos obligations déclaratives ou, le cas échéant, aux services centraux de la direction générale des finances publiques (DGFiP).
À ce titre, sachez que la bonne foi du contribuable n'est pas retenue lorsqu'il saisit, pour une même demande, plusieurs services, de façon simultanée ou successive, sans en informer expressément chacun d'entre eux, et ce afin d'obtenir plusieurs prises de position. Cette démarche étant considérée comme abusive par l'administration fiscale.
Si la demande est incomplète, l'administration vous adresse, par lettre recommandée avec avis de réception, un courrier afin d'obtenir des renseignements complémentaires. Vous devez alors transmettre ces éléments selon les mêmes modalités que celles prévues pour le dépôt de la demande initiale.
A noter : si vous adressez une demande de rescrit à un service incompétent, celui-ci doit se charger de la transférer sans délai au service compétent et vous en informer.
Quel est le délai de réponse ?
L'administration est normalement tenue de répondre à votre demande dans un délai de 3 mois. Ce délai commençant à courir à compter du jour de la réception de la demande par le service compétent.
Étant précisé qu'en cas de demande de renseignements complémentaires, le délai se décompte à partir du jour de la réception de ces compléments d'information.
Mais aucune sanction n'est prévue lorsque l'administration ne respecte pas ce délai. Celle-ci considère d'ailleurs que le défaut de réponse de sa part dans le délai imparti ne vaut pas accord tacite, seule une réponse expresse pouvant l'engager, excepté dans le cadre de rescrits dits« spécifiques». En effet, par exception, pour certains régimes fiscaux limitativement visés par la loi (crédit d'impôt recherche, qualification fiscale de l'activité professionnelle ...).L' absence de réponse de l'administration dans le délai qui lui est imparti vaut accord tacite.
Ces rescrits spécifiques répondant, sous réserve de quelques particularités, aux mêmes conditions que celles applicables au rescrit général.
La réponse de l'administration doit donc être formelle. En pratique, il s'agit d'une réponse écrite et signée par un fonctionnaire qualifié pour engager l'administration, c'est-à-dire ayant au moins le grade de contrôleur. Cette prise de position doit être suffisamment explicite, précise et non équivoque, et avoir été portée officiellement à votre connaissance.
À ce titre, l'administration fiscale considère que ses courriels de réponse aux questions des contribuables ne constituent pas, en principe, une prise de position formelle.
Quelle garantie offre le rescrit ?
La prise de position de l'administration fiscale lui est, en principe, opposable.
En d'autres termes, l'administration ne pourra plus procéder à un redressement de l'imposition concernée en se fondant sur une position différente de celle qu'elle a prise dans sa réponse. Si tel était le cas, vous pourriez vous prévaloir du rescrit pour contester les impositions supplémentaires ainsi mises à votre charge.
Étant précisé que l'administration n'est engagée qu'au regard du texte fiscal sur le fondement duquel elle a pris position.
Et que la prise de position de l'administration doit intervenir avant la date d'expiration du délai de déclaration de l'impôt contesté ou, à défaut d'obligation déclarative, avant la date de mise en recouvrement de cet impôt, c'est-à-dire avant la liquidation spontanée de l'impôt (exemples : impôt sur les sociétés, TVA). Par exception, pour les impôts locaux (sauf la CVAE), cette condition d'antériorité s'apprécie à la date du fait générateur de l'imposition (par exemple, au 1er janvier de l'année d'imposition pour la CFE).
Et la fin de la garantie ?
La garantie offerte par le rescrit prend fin lorsque l'administration modifie sa position. Dans ce cas, ce changement ne vaut que pour l'avenir et après que vous en avez été informé. Il est également mis fin à la garantie lorsque la législation qui s'appliquait à votre situation est modifiée ou lorsque votre situation a elle-même évolué.
Devez-vous suivre la réponse de l'administration ?
En théorie, vous n'êtes pas tenu de suivre la position de l'administration fiscale.
Mais, en ne suivant pas ses recommandations, vous prenez le risque de vous exposer, outre à la mise en œuvre d'un redressement fiscal, à des pénalités pour manquement délibéré au taux de 40 %.
Attention donc au possible effet pervers du rescrit !
A noter : lorsque la réponse de l'administration fiscale ne vous satisfait pas, vous pouvez, dans les 2 mois suivants, solliciter un second examen de votre demande. Cette nouvelle demande de rescrit doit être adressée au service des impôts à l'origine de la réponse initiale, selon les mêmes modalités. Et cette fois, c'est une formation collégiale qui examinera votre demande. Mais attention, vous ne pourrez pas invoquer d'éléments nouveaux.
Conclusion
En définitive, il peut s'avérer utile de sécuriser votre situation par le biais du rescrit fiscal.
Mais méfiez-vous, car avec ce rescrit, vous attirez l'attention de l'administration sur le doute que vous avez. Solliciter son avis est loin d'être anodin.
Une réflexion en amont et une prise de conseils sur l'opportunité de recourir au rescrit fiscal sont donc indispensables.